11 vaccins obligatoires pour les enfants : avancée médicale ou recul des libertés individuelles ?

Vaccin enfant

Agnès Buzyn, nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé, n’a pas perdu de temps pour annoncer sa réforme sur la vaccination chez les enfants qu'elle considère comme une priorité. Son but ? Ajouter huit vaccins obligatoires aux trois déjà en vigueur. Une lutte annoncée pour la France, un des pays les plus sceptiques en matière de politique vaccinale.

Une politique vaccinale ferme envisagée par Mme Buzyn

« Il y a des fois où l’obligation est une bonne chose pour permettre à la société d’évoluer »

C’est avec ces quelques mots donnés au journal Le Parisien qu’Agnès Buzyn, nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé du gouvernement Macron a justifié sa décision d’ajouter huit vaccins obligatoires pour les enfants à partir de deux mois - coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C qui sont aujourd’hui seulement recommandés - au DTP (Diphtérie, Tétanos, Polio) déjà en vigueur. Et même si la durée de cette obligation ne pourrait être limitée qu’à 5 ou 10 ans, le fait même d’imposer aux parents un tel impératif a été accueilli plus que froidement.

La faute à un scepticisme tenace des Français, champions du monde de la méfiance à l'égard des vaccins, quant aux possibles réactions engendrées par ces derniers et une gratuité des produits largement oubliée. Les vaccins sont en effet actuellement remboursés à hauteur de 65 % par la CPAM et à 70 % pour l’acte médical. Certaines mutuelles familiales peuvent néanmoins combler la différence. Deux paramètres qui ont fait baisser à 75 % le taux de couverture vaccinale infantile contre les 95 % préconisés par la nouvelle ministre. Un faible pourcentage qui s’explique également par la co-existence de vaccins obligatoires et recommandés qui ont tendance à perdre les parents. Mme Buzyn, ex-professeure d’hématologie à l’hôpital Necker va, elle, plus loin dans la réflexion en nommant ce double système vaccinal de « vrai problème de santé publique ». Alarmiste ou réaliste ? Face aux dix enfants décédés de rougeole depuis 2008 et aux nombreux cas de méningites fatales qui détruisent des familles, la question reste entière.

Onze vaccins obligatoires pour les enfants mais gratuits !

Pour autant, afin de mieux faire passer la pilule du calendrier vaccinal pour les enfants, Agnès Buzyn va devoir inévitablement se pencher sur la question de la gratuité des produits. Une gratuité qui pourrait peser lourd dans l’escarcelle déjà bien vide de la Sécurité Sociale et qui obligerait les mutuelles à monter au créneau. Et à l’heure des complémentaires santé d’entreprise obligatoires et leur panier de soins très générique, le remboursement à 100 % des vaccins infantiles pourrait poser un vrai problème. En outre, les détracteurs crient déjà au complot des industries pharmaceutiques qui trouveraient dans ces vaccinations obligatoires une manne financière importante. Un amalgame que réfute tout net la ministre en protestant que

« Oui, les industriels gagnent de l'argent, mais [qu’]on ne peut pas réduire la question de la vaccination à l'intérêt des laboratoires ».

Ce rapprochement n’a pas l’air de troubler les Français qui attendent avec impatience les vaccins contre Ebola ou Zika – dont les effets secondaires ne sont pas encore connus – mais n’hésitent pas à remettre en question les existants dans leur politique de vaccination actuelle. Le monde de la santé n'a pourtant de cesse de répéter qu'ils ont de leur côté contribué à lutter contre les maladies infectieuses et à prévenir de nombreuses épidémies en sauvant de nombreuses vies durant le siècle passé.

Agnès Buzyn devrait prévoir également la mise en place d’une clause d’exemption pour les familles dont les convictions religieuses ou médicales iraient à l’encontre de la nouvelle politique vaccinale. Mais là encore, cette dispense sera étroitement surveillée par le gouvernement qui ne supportera aucun excès. Des mesures exagérées ? Dans un pays proche comme l'Allemagne, les parents qui refusent systématiquement de faire vacciner leur enfant peuvent, en théorie, écoper d’une amende de 2 500 euros. Dans les autres pays européens comme la Suède ou l’Espagne, l’obligation a laissé place à la recommandation avec, à la clé, des résultats plus qu’encourageants, en particulier pour ce pays nordique, qui affiche un taux de vaccination infantile de 96 %.

Des associations puissantes contre cette politique de vaccination

Face à cette mesure gouvernementale, plusieurs associations ont élevé la voix. Ainsi, l’Institut pour la Protection de la Santé Naturelle (IPSN) a mis en place une pétition mettant en lumière les contradictions du rapport publié par le Comité d’orientation citoyenne sur la vaccination lancée par Marisol Touraine, ancienne ministre de la Santé, en novembre 2016. Un document qui décrit notamment les dangers de l’utilisation d’un super vaccin hexavalent (traitant six autres maladies en plus de la DT-polio chez les enfants et contenant de l’aluminium et du formaldéhyde susceptibles de déclencher de graves maladies) à la place de la simple injection contre la DTP moins chère mais introuvable depuis 2008 sur le marché. Raison pour laquelle le Conseil d'Etat avait demandé au gouvernement en février dernier de prendre des mesures pour rendre l’injection des trois vaccins obligatoires disponible d'ici le 8 août.

Ce délai serré a amené Agnès Buzyn à rapidement prendre position sur la question : lever l'obligation vaccinale des enfants par décret ou à l'inverse étendre la liste des obligations vaccinales afin qu’elle corresponde au vaccin hexavalent disponible sur le marché.

L’Union Nationale des Associations Citoyennes de Santé (UNACS) s’est également érigée contre cette obligation vaccinale en mettant à disposition en ligne un bulletin d’adhésion destiné à réunir les Français qui souhaitent faire entendre leur mécontentement. Des grondements qui trouvent une assise certaine dans le scepticisme ambiant lorsque les études favorables à une extension démentent le potentiel danger des injections et appellent à une bonne dizaine d’années de recul pour repérer les éventuels effets secondaires du vaccin hexavalent. Reste que le simple fait de vacciner des jeunes enfants contre plusieurs maladies peut déclencher un choc anaphylactique et potentiellement augmenter le risque de maladie auto-immune sur le long terme.

Surfant sur l'actualité, un nouveau mouvement se voulant indépendant et apolitique - En Marche pour la Liberté Vaccinale - réunissant une quinzaine d'associations citoyennes a par ailleurs été lancé le 19 juin sous l'impulsion de Stéphanie Donzello, présidente des associations Vaccinathon et Prévention Vaccin, suite à l'annonce de Mme Buzyn d'étendre l'obligation vaccinale à 11 vaccins. Un rassemblement à Paris, Perpignan, Nantes et Grenoble a d'ailleurs été prévu pour le 9 septembre afin d'appeler à repenser la politique vaccinale.

Dans ce contexte, la nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé reprendra-t-elle à son compte la clause d'exemption proposée par le Comité d’orientation citoyenne sur la vaccination et arrivera-t-elle à faire passer son obligation vaccinale face aux nombreuses polémiques à venir ? En outre, sa mise en pratique face à une Assurance Maladie qui boit la tasse depuis des années risque de promettre quelques discussions pour le moins houleuses. Espérons que cela sera l'occasion de débats intéressants et constructifs.